QG ZAZALÉ , UN LABORATOIRE D’INNOVATION POLITIQUE ET SOCIALE A LA RÉUNION
L’histoire du QG zazalé trouve son origine dans le mouvement des Gilets jaunes. Très fort à La réunion dès le 17 novembre 2018, ce mouvement social d’ampleur a cristallisé l’expression de la colère et des difficultés structurelles de la population réunionnaise : le coût de la vie, les inégalités sociales, la confiscation de la parole citoyenne, la méfiance envers les élus, l’accès à la terre, la défense de la culture et de la langue créole réunionnaise.
A l'origine, les gilets jaunes
L’île a été très rapidement bloquée par le mouvement. Comme partout dans l’Hexagone, des barrages routiers ont été érigés et les rond-points sont devenus des espaces de paroles et de rassemblement citoyens. En décembre, le gouvernement d’Edouard Philippe a dépêché sur place Annick Girardin, la ministre des outre-mers, pour éteindre le feu. Des promesses ont été faites aux élus et à des représentants du mouvement des Gilets jaunes. Les fêtes de fin d’année approchant aussi, le mouvement s’est arrêté assez brutalement.
Au Sud de l’île, dans la commune du Tampon, le grand rond-point des Azalées, du nom de la tour qui le surplombe, a été un noyau actif du mouvement des Gilets jaunes. Pendant les barrages routiers et les manifestations, de nombreuses personnes s’y sont retrouvées. Les unes apportant les marmites de cari pendant que les autres bloquaient la route, axe majeur reliant Le Tampon à Saint-Pierre sur le littoral. Un aménagement sommaire du rond-point commence avec l’installation de chaises pour les ronkozé (assemblées générales), d’une bâche pour se protéger du soleil, de tables pour prendre les repas ensemble. Le QG zazalé est né.
L'installation à demeure sur le rond-point !
Après l’arrêt du mouvement des Gilets jaunes sur l’île, un très petit groupe de personnes décident d’occuper à demeure le rond-point pour montrer que les revendications portées par la population n’ont pas été entendues. Jean-Albert, Xavier, Jade, Lola, Richard, s’installent sur le rond-point ou soutiennent matériellement celles et ceux qui s’y installent. Les premières cabanes sont montées, l’espace d’accueil collectif aussi. L’organisation de la vie dans le QG zazalé se précise avec des valeurs, des principes, des règles et des rendez-vous réguliers. Sont inscrits au calendrier du QG zazalé les ronkozé du lundi soir, des concerts, des distributions de nourriture, des chantiers particip’actifs.
En 2020, le rond-point est déjà bien aménagé et comporte une dizaine de résidents permanents. Des plantations et l’élevage de petits animaux et de volailles s’y sont développés, illustrant par le faire l’objectif d’autonomie alimentaire. Des journées de convergence des luttes y sont organisées pour transformer la société réunionnaise et ses cadres politiques. Une véritable éducation politique et populaire s’y déroule, que n’entame pas l’épidémie de covid-19.
Un projet pour La Réunion
En parallèle, le QG zazalé travaille à l’élaboration d’un projet plus global et inspirant pour La Réunion, qui pourrait s’apparenter à un écovillage mais adapté au mode de vie réunionnais et aux valeurs traditionnelles de solidarité et d’entraide de la société créole. Le modèle traditionnel d’une agriculture vivrière familiale y serait développé pour arriver à l’autosuffisance alimentaire en s’appuyant sur le savoir-faire des anciens. La parole politique y serait restituée aux citoyens par l’institution d’une gouvernance collective. Le rond-point est le laboratoire d’expérimentation politique, sociale, économique et écologique, qui préfigure déjà le projet à plus grande échelle. En open source, le projet des zazalés a pour ambition d’inspirer un changement de modèle à La Réunion et de permettre au peuple réunionnais de reprendre en main son destin « pour nous-mêmes, par nous-mêmes ! ».